Par un arrêt du 13 février 2019, le Conseil d’Etat a rendu une décision intéressante sur la question de savoir si les documents comptables adressés par les partis politiques à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) dans le cadre du contrôle puis de la publication des comptes des partis politiques au Journal officiel de la République Française étaient ou non communicables au public.
En l’espèce, le parti politique « Rassemblement National » avait saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi afin de demander l’annulation du jugement du 7 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris avait enjoint à la CNCCFP de communiquer au journal Médiapart, au titre de l’accès du public aux documents à caractère administratif, une convention de prêt conclue entre le parti politique « Front National » et une banque russe.
L’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l’administration dispose en effet que « sont considérés comme documents administratifs (…) quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission » et que « constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions ». Le code des relations entre le public et l’administration encadre cependant ce droit d’accès du public aux documents administratifs en prévoyant que ne sont pas communicables les documents préparatoires à une décision administrative ainsi que les documents dont la transmission porterait atteinte, notamment, au secret des affaires.
Le Conseil d’Etat va préciser que, tant que la CNCCFP n’a pas achevé l’instruction des comptes des partis politiques et que ces comptes n’ont pas été publiés, l’ensemble des pièces comptables adressées par les partis politiques constituent des documents préparatoires qui ne peuvent donc être communiqués.
Toutefois, dès la publication des comptes des partis politiques au Journal officiel de la République Française, ces pièces comptables perdent la qualité de documents préparatoires et deviennent donc communicables au public.
Dès lors, le Conseil d’Etat va considérer que la convention de prêt conclue le 11 septembre 2014 entre le parti politique « Front National » et une banque russe constitue bien un document administratif communicable au public alors même que la convention en question comporte une clause de confidentialité. Cependant, la transmission de ce document implique préalablement d’occulter les informations qui seraient susceptibles de porter atteinte au respect du secret des affaires (coordonnées bancaires du parti, taux et durée du prêt, éléments concernant la stratégie commerciale de la banque, etc.).
Consulter l’arrêt du Conseil d’Etat n° 420467 du 13 février 2019