Par un arrêt du 25 octobre 2018, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rendu une décision intéressante en matière de responsabilité de l’Etat du fait des lois.
La société SOMAF, qui possédait l’exclusivité de l’importation et de la distribution en Guadeloupe de la boisson de type premix « Smirnoff Ice » avait formé un recours en responsabilité contre l’Etat aux motifs que la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique doublait le montant de la taxe sur les boissons premix et qu’elle revenait donc à mettre fin à la commercialisation de cette boisson, ce qui lui provoquait un préjudice dont elle réclamait l’indemnisation.
La cour va logiquement rechercher si les critères de la responsabilité sans faute de l’Etat du fait des lois sont réunis et rejeter la requête de la société SOMAF. La cour relève tout d’abord que le préjudice financier dont la société se prévaut ne s’applique pas à elle seule mais à l’ensemble des fabricants et importateurs de boissons « premix » en France. Le préjudice n’est donc pas « spécial ». La cour relève ensuite, d’une part, que la taxe en question a été instaurée avant même que la société ne commence à importer et à distribuer cette boisson en Guadeloupe et, d’autre part, que la société SOMAF commercialise d’autres produits que la boisson « Smirnoff Ice ». Elle ne démontre donc pas que le préjudice qui lui est causé par la loi est d’une gravité telle qu’il excéderait les charges normales imposées aux distributeurs de produits alcoolisés, eu égard aux impératifs de santé publique qui ont conduit à l’instauration de cette taxe. Le préjudice n’est donc pas « anormal ».
Bien que le législateur n’ait pas entendu exclure explicitement toute indemnisation des préjudices résultant de cette taxe, la cour administrative d’appel de Bordeaux va considérer que les conditions d’engagement de la responsabilité de l’Etat sur le fondement de la rupture d’égalité devant les charges publiques ne sont pas réunies.